Vente de semences à des amateurs, une clarification juridique bienvenue

Écrit par aGuibert
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11-06-2020

La loi relative à la transparence de l’information sur les produits agricoles et alimentaires, dont l'article 10 rétablit l'article 78 de la loi Egalim censuré par le Conseil constitutionnel qui consacre la possibilité de la vente de semences de variétés du domaine public non inscrites au Catalogue officiel à des amateurs a été promulguée le 10 juin 2020 et publiée au JO ce jour.


EDIT du 08 juillet 2020

Nouveau rebondissement dans ce feuilleton : la Commission européenne a ém is un « avis circonstancié » le 23 juin 2020 (soit plus de 10 jours après l’entrée en vigueur de la loi), allant à l’encontre des dispositions de l’article 10 (autorisant explicitement la vente à des amateurs de semences de variétés du domaine public non inscrites au Catalogue officiel).

Pour plus de précisions, vous pouvez vous référer à cet article.


Pour rappel, si cet article apporte une clarification bienvenue, en inscrivant noir sur blanc la possibilité de vendre à des amateur-e-s des variétés du domaine public non inscrites au Catalogue officiel, il ne change rien à la situation actuelle. Le RSP estime en effet, qu’aujourd’hui comme hier, il est légalement possible de vendre à des jardinier-ère-s des semences de variétés non inscrites au Catalogue officiel des variétés. Selon l’interprétation du RSP du décret 81-605 relatif au commerce des semences, la définition de commercialisation donnée par ce dernier, qui conditionne l’obligation d’inscription au Catalogue officiel des variétés, ne concerne que les cessions faites « en vue d’une exploitation commerciale de la variété ». Cela concerne par exemple la vente de semences à des agriculteurs, qui par définition en font une exploitation commerciale en vendant ensuite des légumes ou céréales... A l’inverse, rien n’interdit la vente à des amateur-e-s de semences non inscrites au Catalogue officiel des variétés. -> voir le kit réglementaire et en particulier la fiche 2.

L’article L.661-8 du Code rural est donc maintenant ainsi libellé (modifications en gras) :

« Les règles relatives à la sélection, la production, la protection, le traitement, la circulation, la distribution et l’entreposage des semences, des matériels de multiplication des végétaux, des plants et plantes ou parties de plantes destinés à être plantés ou replantés, autres que les matériels de multiplication végétative de la vigne et les matériels forestiers de reproduction, ci-après appelés " matériels ” en vue de leur commercialisation, ainsi que les règles relatives à leur commercialisation, sont fixées par décret en Conseil d’Etat. Ce décret fixe :

1° Les conditions dans lesquelles ces matériels sont sélectionnés, produits, multipliés et, le cas échéant, certifiés, en tenant compte des différents modes de reproduction ;

2° Les conditions d’inscription au Catalogue officiel des différentes catégories de variétés dont les matériels peuvent être commercialisés ;

3° Les règles permettant d’assurer la traçabilité des produits depuis le producteur jusqu’au consommateur.

La cession, la fourniture ou le transfert, réalisé à titre gratuit ou à titre onéreux de semences ou de matériels de reproduction des végétaux d’espèces cultivées de variétés appartenant au domaine public à des utilisateurs finaux non professionnels ne visant pas une exploitation commerciale de la variété n’est pas soumis aux dispositions du présent article, à l’exception des règles sanitaires relatives à la sélection et à la production. »

A noter : la vente de plants maraîchers n'est pas concernée. La vente de plants maraîchers de variétés non inscrites au Catalogue officiel reste réglementairement interdite par le décret n°94-510 du 23 juin 1994 relatif à la commercialisation des jeunes plants de légumes  (situation légèrement ubuesque !). Le RSP remet toutefois depuis toujours en cause cette incohérence, et accompagne les maraîchers qui font de la vente occasionnelle de plants. Pour plus de précision, vous pouvez consulter la fiche "Fiche(s) à destination des maraichers ayant une activité complémentaire ou saisonnière de vente locale de plants de légumes à des collègues ou à des amateurs." (disponible sur notre site internet, onglet "Semons nos droits/fiches pratiques").

EDIT du 23/06 : Le sujet a été abordé sur France Inter le 22 juin 2020 dans l'émission "La tête au carré" dans un entretien avec Patrick de Kochko. Vous pouvez réécouter en replay cette émission ici.