Ressources génétiques

Crédit D. Westhoff.Crédit D. Westhoff.

La notion de « ressources génétiques » associe une représentation de la nature comme ressource et l’idée que la diversité du vivant se jouerait essentiellement au niveau du gène. Pour l'industrie et la génétique moderne, il s'agit classiquement de conserver ces ressources d'un type particulier dans les banques de gènes et de transformer dans les centres de recherche cette matière brute en variétés « améliorées ». Cette vision minière du vivant aboutissant à une érosion génétique sans précédent, la conservation et le renouvellement de la biodiversité cultivée sont peu à peu devenus un enjeu important au niveau mondial. Deux textes principaux tentent d'y répondre et ont été signés par la France et l'Union Européenne. Les semences sont ici considérées comme des ressources génétiques (ou phytogénétiques).

1. La Convention sur la Diversité Biologique (CDB) complétée en 2010 par le Protocole de Nagoya sur l'utilisation des ressources génétiques et des savoirs traditionnels associés peut concerner les espèces cultivées non couvertes par le TIRPAA (voir ci dessous), par exemple le soja, la tomate, le quinoa... Le protocole de Nagoya a pour but de défendre la biodiversité et de combattre ce que l’on appelle la « biopiraterie », c’est-à-dire l’appropriation illégitime des ressources génétiques et des connaissances traditionnelles autochtones. De nombreux abus ont en effet eu lieu, lorsque des firmes pharmaceutiques, issues généralement des pays du Nord, ont déposé des brevets sur les propriétés de certaines plantes, avec pour effet de déposséder des populations autochtones qui en faisaient usage, parfois depuis des siècles.

Pour cela, le protocole tente un compromis, en permettant d’une part l’accès pour les entreprises aux ressources génétiques, mais en conférant d’autre part aux populations autochtones le droit de consentir à l’usage de leurs connaissances traditionnelles et de fixer en contrepartie des conditions, notamment pour percevoir un retour sur les bénéfices réalisés par les firmes. Concrètement, l'accès et l'utilisation des ressources génétiques est conditionné à l'élaboration d'un accord bilatéral de consentement préalable et de partage des bénéfices avec le pays fournisseur.

2. Le Traité International sur les Ressources Phytogénétiques pour l’Alimentation et l’Agriculture, (TIRPAA) porte sur l’accès aux ressources phytogénétiques, le partage des bénéfices, la conservation y compris in situ, l'utilisation durable et aussi sur les droits des agriculteurs. Il concerne une liste limitée d'espèces qui sont énumérées dans son annexe 1 (pour l'instant 64).

Le TIRPAA supprime la souveraineté nationale des États sur leurs ressources phytogénétiques qui sont gérées via un mécanisme supranational appelé Système multilatéral d'accès facilité et de partage des avantages (MLS). Le MLS remplace l’accord bilatéral de consentement préalable et de partage des bénéfices de Nagoya par un Accord Type de Transfert de Matériel (ATTM) engageant le bénéficiaire :

a. À ne pas revendiquer de droit de propriété intellectuelle pouvant limiter l’accès pour la recherche et la sélection à la ressource sous la forme sous laquelle elle a été remise ;

b. Verser au Fonds de partage des avantages du Traité une part des bénéfices qu’il tirera de son utilisation uniquement si les nouvelles semences qu’il met en marché sont protégées par un titre de propriété industrielle n’accordant pas d’exception de recherche et de sélection. En pratique, ce mécanisme est facilement contourné par les entreprises et n'empêche pas le dépôt de droits de propriété (COV ou brevet) ne respectant pas les droits des agriculteurs.

En l'état, le MLS est contradictoire avec l'article 9 du traité qui reconnaît l'immense contribution passée, présente et future des agriculteurs à la conservation de la biodiversité cultivée ainsi que leurs droits de ressemer, d'échanger et de vendre leurs semences produites à la ferme, le partage équitable des avantages, la protection des savoirs traditionnels et la participation des agriculteurs aux décisions nationales sur la biodiversité et place la réalisation de ces droits sous la responsabilité des États.

Dernière relecture : avril 2020

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