Assemblée Nationale : Séance du 22-10-2014, Questions au Gouvernement sur des sujets européens - Traité transatlantique

Niveau juridique : France

M. le président. La parole est à M. François Asensi, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. François Asensi. En mai dernier, les députés du Front de gauche ont exigé la suspension des négociations sur le marché transatlantique car le projet TISA – Trade In Services Agreement – sur la libéralisation des services et le Traité transatlantique incarnent une mondialisation ultralibérale qui bafoue la souveraineté des États, privatise les services publics, abaisse les droits sociaux et les normes environnementales.

La publication du mandat de négociation est une première victoire de la mobilisation citoyenne. Mais des questions demeurent : pourquoi le Gouvernement a-t-il refusé, en mai dernier, d’inscrire noir sur blanc que le TAFTA soit ratifié par le Parlement français ? Comment la France pourrait-elle accorder un blanc-seing à une Commission européenne partiale et ultralibérale ? Un président luxembourgeois défenseur inlassable des paradis fiscaux, un commissaire à l’énergie proche des lobbies pétroliers, un commissaire à la régulation bancaire en provenance de la City : c’est tout ce que les peuples européens rejettent !

Sur le fond, le mécanisme d’arbitrage privé au service des multinationales n’a pas été sorti des négociations. La commissaire européenne chargée du commerce l’a reconnu devant le Parlement européen, mais en défendant la présence de ce dispositif explosif dans l’accord déjà signé avec le Canada.

Avec ce traité, Monsanto pourra attaquer en justice notre principe de précaution pour imposer les OGM, Goldman Sachs demander la suppression de la taxe Tobin, les fonds de pension rançonner les États comme ils l’ont déjà fait en Argentine.

Monsieur le secrétaire d’État chargé du commerce extérieur, puisque les libéraux européens veulent maintenir cette boîte de Pandore arbitrale qui affaiblira la France, n’est-ce pas une condition suffisante pour demander la suspension des négociations ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

Mme Laurence Abeille. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger.

M. Matthias Fekl, secrétaire d’État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger. Monsieur le député, vous posez une question sur un sujet d’intérêt majeur. J’ai eu l’occasion, il y a quinze jours, de répondre ici même à une question concernant le traité avec le Canada, je le fais volontiers aujourd’hui s’agissant des négociations sur le traité transatlantique avec les États-Unis.

Dès le lendemain de ma nomination, je me suis saisi de cette question,…

M. Christian Jacob. Oh alors, ça va être chaud !

M. Matthias Fekl, secrétaire d’État. …faisant des démarches auprès de l’Union européenne, me rendant à Bruxelles, à Berlin et à Rome pour rencontrer l’ensemble des ministres du commerce extérieur afin d’obtenir des avancées sur la transparence. Nous sommes d’accord sur ce point : il ne peut plus y avoir de négociations commerciales totalement opaques. Par conséquent, la France, avec l’Allemagne, la présidence italienne et d’autres États européens a enfin obtenu la transparence sur les mandats de négociation, et je m’en félicite.

M. Pierre Lellouche. Où voyez-vous de la transparence ?

M. Matthias Fekl, secrétaire d’État. Vous posez également la question des mécanismes d’arbitrage investisseurs-États. Je note à cet égard les propos qu’a tenus ce matin le nouveau président de la Commission européenne : il a indiqué clairement son refus de voir l’accès aux juridictions nationales limité et des juridictions secrètes avoir le dernier mot en la matière. C’est la preuve que lorsque la France, l’Allemagne et nos partenaires européens s’expriment ensemble, les choses avancent. J’ai également travaillé sur ce sujet avec mon collègue Harlem Désir, qui s’entretient régulièrement de cette question avec ses homologues européens.

Et puis, s’agissant du dernier mot pour le Parlement, je réaffirme ici avec force que les Parlements nationaux devront avoir le dernier mot, comme il est normal en démocratie. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)

Lien : www.assemblee-nationale.fr/14/cri/2014-2015/20150029.asp