Assemblée nationale : Rapport du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques sur l’évaluation de l’action de la douane dans la lutte contre les fraudes et trafics

Niveau juridique : France

Extraits choisis :

«  2. L’étroite coopération avec la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF)

La coopération avec la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) est jugée par la Cour tellement étroite qu’elle souligne « les chevauchements importants » entre les deux directions pour finir par s’interroger sur leur rapprochement dans une entité unique, responsable de la police de la marchandise.

Il est patent que les deux directions interviennent parfois dans les mêmes secteurs d’activité au titre du contrôle de la conformité aux normes des produits et des marchandises, d’autant que la globalisation des échanges a singulièrement augmenté la proportion de biens importés, totalement ou partiellement, disponibles sur le marché intérieur, renforçant d’autant le périmètre d’intervention de la douane.

Lors de son audition par les rapporteurs, la DGCCRF a toutefois pris soin de préciser que ce champ commun de compétences relevait de missions complémentaires, précisées d’une part par le code de la consommation et d’autre part par le code douanier, et non pas identiques ou superposables.

Pour se faire bien comprendre, le représentant de la DGCCRF a pris l’exemple du contrôle conjoint d’un pot de miel en relevant que l’agent de la DGCCRF s’attacherait par exemple à vérifier que le produit était bien du miel de lavande comme l’affichait son étiquette, alors que le douanier s’attacherait plutôt à mesurer son taux de sucre afin de déterminer le tarif douanier applicable à cette marchandise.

Les deux administrations peuvent donc s’intéresser aux mêmes marchandises mais souvent pour des raisons différentes. Fusionner les directions ou rattacher la DGCCRF à la DGDDI – l’une compte 3 000 agents équivalent temps plein, contre plus de 16 600 pour l’autre – aurait pour conséquence de s’engager dans un programme de formation croisée des agents loin d’être évident car la polyvalence complète semble impossible à atteindre, compte tenu de la diversité et de la complexité des réglementations applicables.

Les directions doivent en revanche continuer à renforcer leur coopération dans la continuité du protocole de 2011, applicable jusqu’en 2016 et décliné localement et annuellement au niveau national.

Les secteurs concernés par cette coopération sont essentiellement les produits industriels, les contrefaçons de marques, les denrées alimentaires et aliments pour animaux d’origine non animale en matière sanitaire, le secteur vitivinicole, le commerce électronique et les laboratoires.

Les modalités de la coopération consistent en échanges d’informations (600 fiches de liaison échangées en 2013), en contrôles coordonnés (plus de 17 600 en 2013) ou en contrôles conjoints (300 en 2013) ou en accès croisé aux bases de données « métier ».

S’agissant des produits industriels, les deux directions élaborent chaque année un plan commun de contrôle sur des produits devant faire l’objet d’une surveillance renforcée. Les jouets et les articles de puériculture sont considérés comme des thèmes permanents de contrôle, compte tenu de leur sensibilité particulière.

En 2015, au-delà des petits appareils électroménagers domestiques et des appareils d’éclairage, 46 catégories de produits industriels relevant de 18 réglementations différentes ont été sélectionnées sur la base des principaux risques potentiels dont la programmation du contrôle relève de l’une ou l’autre des directions ; celles-ci doivent s’échanger les résultats de leurs contrôles et se répartir les entreprises à contrôler afin d’éviter des contrôles redondants à périodes rapprochées, dans la mesure où certains opérateurs sont susceptibles d’être contrôlés par les deux directions.

En matière d’internet, les rapporteurs regrettent que le centre de surveillance du commerce électronique (CSCE) de la DGCCRF, compétent pour veiller au respect de la réglementation applicable à la consommation et à la concurrence par le e-commerce, ne soit pas mieux traité que cyberdouane (voir supra), puisqu’il ne compte que 10 agents équivalent temps plein.

Les deux directions s’appuient enfin sur un réseau de laboratoires communs, fusionnés en 2007 pour créer le service commun des laboratoires (SLC) qui comptait en 2012 plus de 400 agents pour un budget de plus de 34 millions d’euros.

Louable dans son principe, puisque cette mise en commun de moyens d’analyses semblait logique au regard de la coopération entre les deux directions, cette fusion ne s’est pas accompagnée, selon la Cour, des gains de productivité attendus, comme elle l’a sévèrement exprimé dans un référé en date du 16 avril 2014 en ces termes : « Les gains d’efficience engendrés par la fusion ont été nuls, alors que d’une manière générale, les activités d’analyse ont bénéficié d’évolutions technologiques de nature à générer des gains de productivité importants dans les laboratoires d’analyses publics et privés. Ce résultat s’explique pour une large part par le fait que la fusion s’est opérée à l’identique en termes de structure et qu’elle n’a pas été à l’origine d’une politique de regroupement géographique et de spécialisation, propre à générer des gains de productivité. »

La Cour déplorait également l’absence de mise en œuvre d’une comptabilité analytique qui permettrait de comparer la performance entre les nombreux laboratoires du SLC et les prestataires extérieurs, de facturer aux opérateurs mis en cause le coût des analyses des produits déclarés non conformes et de rendre possible une facturation interne des prestations fournies par le SCL aux deux directions afin de leur faire supporter le coût réel des analyses qu’elles commandent.

Les rapporteurs ne peuvent qu’appuyer cette recommandation qui figure comme une priorité du cadre d’orientation pluriannuel du SCL signé par les deux directrices générales le 2 juillet 2014. »