Une Europe sans droits de propriété intellectuelle sur les semences

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Réseau Semences Paysannes,

Résumé

Le Certificat d’Obtention Végétale (COV) entretient une opacité malsaine car il protège les inventions et les découvertes sans donner aucune information sur les méthodes de sélection et l’origine des plantes utilisées. Ce qui ouvre la portes à l’utilisation massive, puisque incontrôlable, des nouvelles manipulations génétiques non soumises à réglementation et de la biopiraterie. De plus, ce certificat interdit à toute personne de commercialiser ou utiliser la découverte sans l’accord préalable de l’inventeur… C’est-à-dire l’industrie. Conséquence : les paysans sont obligés de payer des royalties lorsqu’ils utilisent des semences de fermes qui reproduisent – intentionnellement ou non – le gêne ou la variété de l’industrie. Aujourd’hui, le COV, défendu bec et ongles par les industries semencières, est devenu pire que le brevet.

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Le COV : un instrument de biopiraterie

En 1961, le Certificat d’Obtention Végétale (COV) permet à l’industrie de s’approprier l’exclusivité de la reproduction des plantes « élites » autorisées : défini par les mêmes caractères morphologiques homogènes et stables que le catalogue, le COV protège des inventions, mais aussi des découvertes, sans donner aucune information sur l’origine des plantes utilisées. Ces plantes ont toutes été librement prélevées dans le « patrimoine commun de l’humanité » constitué par les semences paysannes interdites de commercialisation (Voir article Ouvrir le marché aux semences paysannes) et enfermées dans les collections sous le vocable de ressources phytogénétiques. Cette légalisation de la biopiraterie interdit de fait le partage des avantages économiques issus de l’utilisation commerciale de ces ressources pourtant promu par la Convention sur la Diversité Biologique. Contrairement au brevet qui ne protège que des inventions et implique la description de l’invention, donc de l’origine des variétés utilisées et des méthodes de sélections utilisées, ce COV permet de commercialiser, sans informer les consommateurs, des plantes issus de manipulations génétiques autres que la transgénèse (Voir Article « Une Europe sans organisme génétiquement modifié»).

Les semences améliorées sont devenues indispensables, car elles seules peuvent être légalement vendues sur le marché et accepter l’engrais que vend l’industrie. Pourtant, en 1961, les agriculteurs cultivaient encore leurs variétés paysannes qui sont à l’origine de ces variétés améliorées. En ce temps-là, la pratique qui consiste à ressemer chaque année une partie de la récolte précédente était encore largement dominante, il était impossible de la remettre en cause. L’absence de toute recherche pour adapter les variétés paysannes aux conditions modernes de culture, le catalogue obligatoire et la politique agricole les ont faites disparaître en quelques années (Voir article Ouvrir le marché aux semences paysannes). En 1994, la dépendance des paysans européens vis-à-vis des semences de l’industrie est presque totale.

La semence de ferme devient une contrefaçon punissable grâce au fichage génétique !

Un règlement européen qualifie alors les semences de ferme de contrefaçons frappées d’obligation de versement de royalties aux obtenteurs. Mais les difficultés techniques auxquelles se sont heurtés les obtenteurs pour prouver que c’est leur variété qui est reproduite par le paysan et non une autre, ont rendu ce règlement inefficace. Il est en effet très difficile de distinguer avec précisions des variétés très proches les unes des autres à partir de leurs seuls caractères morphologiques, qui évoluent rapidement dès qu’elles sont cultivées sans sélection.

Aujourd’hui, les nouvelles techniques de fichage génétique (marqueurs moléculaires) permettent à un obtenteur de prouver sans difficulté qu’un agriculteur reproduit sa variété et d’exiger, comme avec le brevet sur le gène, le paiement de royalties. Elles permettent aussi, grâce à l’extension de la protection du COV aux « variétés essentiellement dérivées » de la variété protégée, d’annuler le « privilège de l’obtenteur » qui autorise l’utilisation d’une variété protégée pour en créer une autre. Il ne reste pour cela qu’à mettre en application le règlement de 1994 qui permet de déposer un COV sur la base de « caractères issus du génotype » comme les caractères moléculaires.

Le COV pire que le brevet

Le dépôt de multiples brevets sur des gènes dits « climatiques » ou présentant d’autres intérêts menace directement les multiples variétés paysannes qui contiennent naturellement ou seront contaminées par ces gènes. Alors même qu’elle a réclamé et obtenu en 1998 la reconnaissance légale par l’Europe du brevet sur les gènes, l’industrie semencière prétend aujourd’hui être opposée au brevet sur les variétés végétales. Elle présente le COV comme la seule alternative acceptable. Ce COV est pourtant devenu pire que le brevet : comme lui, il permet désormais d’interdire ou de prélever des royalties sur les semences de ferme ou l’utilisation de la variété protégée pour en sélectionner une autre, mais en plus il légalise la biopiraterie ainsi que l’absence d’évaluation et d’information des consommateurs sur les nouvelles manipulations génétiques autres que la transgénèse.

propositions :

  • Rendre obligatoire, pour toute commercialisation de semences, l’indication de l’origine des variétés utilisées pour leur sélection et le lieu de multiplication, afin de pouvoir lutter contre la biopiraterie et se prémunir d’éventuelles contaminations génétiques ;

  • Autoriser sans restriction l’utilisation par les paysans des semences de ferme ;

  • Interdire tout brevet sur le vivant, y compris sur les gènes, et toute forme de protection intellectuelle basée sur le fichage génétique (marquage moléculaire ou séquences génétiques).